Sur France Info, une animatrice reçoit le scénariste d’une série télé. Elle précise : « Alors on le sait, dans les séries, le dernier épisode doit se terminer par ce qu’on appelle un “cliffhanger”. »
A la téloche, un petit reportage sur les arnaques à la carte SIM. Mais « arnaque à la carte SIM » étant sans doute incompréhensible pour chacun de nous, ça devient « un reportage sur le “SIM swapping” ». Dans la foulée, et toujours dans le domaine de la carte bancaire, est évoquée la possibilité de remboursement après un achat en ligne. L’animateur nous propose donc « un reportage sur le “cashback” ».
Une dame de Saône-et-Loire a inventé un truc pour ne plus se retrouver avec des chaussettes orphelines dans le lave-linge. Elle a même obtenu un prix au concours Lépine 2022. Quel nom donne-t-elle à son invention ? Les Keep’socks.
A la télé, à l’issue d’une épreuve de biathlon, le commentateur précise : « Les athlètes viendront s’exprimer à notre micro dans un petit moment, après être passés dans la “changing room”. »
Au cours d’un match de foot, on voit à l’image un joueur se toucher l’arrière de la cuisse. Cela inquiète le commentateur : « Nous allons surveiller son “body language” dans les minutes qui suivent. »
Lu quelque part : « Le sacre possible des Bleus viendra consacrer la stratégie de “soft power” et “sportwashing” du Qatar… »
Dans une épreuve de ski, une concurrente chute. Le commentateur : « Elle a “overshooté” les modules. »
Je sors. Dans la rue, à gauche de l’entrée, une grande inscription sur le mur : “Drive piéton”. Cela me donne l’idée de jeter un œil aux enseignes des boutiques. Sur une cinquantaine de mètres, pas davantage, j’ai noté : “Sushi Home”, “Body minute”, “Fitness Park”, “Kelly Nails”, “Body Hit” et le très poétique “Exploring Food Culture”. Perdu au beau milieu de ces boutiques au “top” de la modernité, ce qui semble être un restaurant a opté pour une enseigne qui paraît ici totalement incongrue : “Comme à la maison”.
J’allume la radio restée sur la fréquence de France Culture. J’entends une dame évoquer les « théoriciennes du Caire ». Je me dis que c’est une émission sur l’Egypte, car, adepte des jeux télévisés, je suis devenu très fort dans le domaine des villes-capitales. Les autres personnes présentes en studio y vont à leur tour de leurs allusions au “Caire”. Tout en préparant mon café, je comprends, en écoutant un peu mieux, que l’animatrice et ses invités parlent en réalité du “care”, des activités professionnelles liées au soin, à l’attention aux personnes. Les mots “soin” et “attention” ne seront d’ailleurs jamais prononcés. Nous sommes à l’heure du “care”. « On est “caring” », dira même l’animatrice.
Dans l’actualité consacrées aux épreuves sportives, j’ai noté qu’on ne dit plus “la pause fraîcheur” quand le jeu s’arrête, sous une grosse chaleur, afin que les joueurs de foot ou de rugby puissent se désaltérer. C’est désormais le “water break”.
Pareillement, un concurrent ne prend plus la tête de la course, à pied ou cycliste. Il prend le “lead”.
J’ai aussi entendu un expert dire « qu’il ne faut pas exagérer le “top-down” des choses ». C’est vrai, je trouve le “top-downing” trop présent, pas vous ?
Une candidate à un jeu télévisé à qui l’on demande ce qu’elle fait dans la vie : « Je fais du “costuming, du make-up”. »
Message qui s’affiche sur mon écran après avoir tenté d’ouvrir un lien : « Oups ! Les “backends” ne répondent plus. Les “roots” sont sur le coup. »
Un animateur de France Culture interroge le rédacteur en chef sortant du quotidien Le Monde. C’est un festival ! Je passe sur les “story-telling”, “fact-checking” et autres horreurs devenues inévitables. Mais j’apprends que lorsqu’il y a des divergences de vue au sein d’une rédaction, il est nécessaire de trouver un “middle ground”. Quand je pense que certains en sont toujours à chercher un compromis ! Ah ! les ringards ! Ils me font pitié.
La chaîne de télévision Teva diffuse une série espagnole intitulée Vida perfecta, ce qui se traduit en français par “Vie parfaite”. Or, la série est diffusée en France sous le titre Perfect Life. Dans le petit article qui lui est consacré par Télérama, on peut lire ceci : « On retrouve ainsi Maria la “control freak”, Cristina la “businesswoman” et Esther, la lesbienne. » Au-dessus de la photo qui illustre l’article, on trouve cette légende cocasse : « Mais pourquoi le titre original espagnol se retrouve à l’export en anglais ? »
Un Cuistre majuscule, Pierre Langlais (nom prédestiné), rédacteur de l’hebdo Télérama, nous recommande une série télé américaine, mettant en avant son rythme plutôt lent, « une vertu, écrit-il, de plus en plus rare à l’heure du “binge watching” ».
Dans un domaine beaucoup moins haut de gamme du journalisme, les commentateurs d’épreuves sportives font très fort également. J’ai ainsi noté qu’un athlète français venait de vivre sa “season best”. Lors d’un tournoi de judo, le commentateur évoque ce que la victoire d’une championne française doit « à sa bonne relation “inside” avec son “coach” ». Lors d’une épreuve cycliste féminine, « les Néerlandaises ont parfaitement “leadé” la course ». J’ai également été invité à suivre le “livetalk” OM-Strasbourg.
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