Deux ans et demi après sa création, l’Union communiste libertaire vient de connaître un mélodrame comme seule cette tendance de l’anarchisme militant sait en offrir sans compter depuis que les organisations libertaires existent.
Une trentaine de militants viennent de rendre public, en effet, un texte dans lequel ils annoncent quitter cette organisation, et en fournissent les raisons. On apprend donc que la tendance « lutte des classes », au cœur même de la doctrine des communistes libertaires, socle sur lequel se fondent les organisations qui s’en réclament, se voit aujourd’hui supplantée par cette bouillie indigeste importée des campus américains et appelée « intersectionnalité ».
Les auteurs du texte dénoncent « une communication interne violente où le débat n’est plus nourri par des points de vue politiques mais s’exprime par anathèmes », ce qui n’a rien de surprenant tant le propos des fanatiques de la race et du genre se distinguent par un goût immodéré pour les condamnations, les interdictions et la censure. « Des accusations sans fondement de racisme ou d’antisémitisme, de sexisme, de complicité de la culture du viol, de transphobie, de validisme, de putophobie, etc., sont proférées sans arguments, écrivent-ils. Seul l’antipatriarcat « post-moderniste » semble avoir le vent en poupe et constitue de fait un bureau politique qui ne dit pas son nom, minorant ainsi la parole des militantes qui portent une approche et une méthodologie autres. Le genre est en effet devenu le prisme de tout échange. Les camarades hommes hétérosexuels sont, notamment, soumis à une critique permanente du simple fait de ce qu’ils sont, quel que soit leur engagement concret dans la lutte pour l’égalité des droits, y compris dans leur vie quotidienne. » Par ailleurs, si le Manifeste de l’UCL rappelle son engagement à défendre « un projet de société libéré de l’aliénation religieuse », les militants en partance semblent vouloir nous dire qu’il est tout de même une religion à ne pas trop froisser, l’accusation d’« islamophobe » équivalant à celle de « raciste » dans l’imposture langagière des intersectionnels.
Je serais tenté ici de plaindre les signataires de ce texte, tant les « intersectionnels » me semblent aussi représentatifs de l’anarchisme que Tariq Ramadan l’est du féminisme. Mais il convient de rappeler une nouvelle fois que ces organisations dites « communistes libertaires » se sont toujours distinguées par un souverain mépris envers celles qui ne faisaient pas de la seule « lutte des classes » l’alpha et l’oméga de l’anarchisme militant. Dénonçant et moquant invariablement l’inefficacité de cet anarchisme qu’ils qualifient dans le meilleur des cas d’humaniste – et ce qualificatif est loin chez eux d’être un compliment –, nos vaillants « communistes libertaires » ont invariablement chanté les louanges de l’Organisation bétonnée, débarrassée des individualistes et autres « archaïques » ou « poussiéreux », sur l’air de « vous allez voir ce que vous allez voir ». Et on a vu, en effet. On a vu ces organisations d’enfer s’écrouler comme châteaux de cartes ou se scinder à une cadence à même de rendre jalouses les sectes trotskistes.
C’est pourquoi ces énièmes jérémiades et pleurnicheries, venues cette fois des lutteurs de classe de l’UCL, parmi lesquels, du moins parmi les plus âgés, certains doivent vouer une certaine admiration pour cette canaille que fut Georges Fontenis, me laissent franchement indifférent. D’autant que dans leur texte de séparation d’avec leur organisation, dès les premières lignes, ils en appellent au recours à ce sinistre plateformisme dans lequel se sont vautrés avant eux d’autres militants aussi « efficaces » qu’eux dans l’échec. Bon vent, camarades !
Ces scientistes depuis l’an pèbre cumulent la « maladie infantile » du mouvement libertaire à tomber dans la chapelle singulière malgré la recherche d’une unité dans la diversité… avec l’ignorance de « Dieu et l’Etat » et du fait que le but correspond aux moyens utilisés pour y parvenir. Au quotidien ils pratiquent déjà les méthodes de Lénine et Trotsky avec « un cadavre dans la bouche ».
C’est Carthage ! C’est Lépante ! C’est Waterloo ! Cest Verdun !
Après le désastre écologique et l’obligation de s’asseoir au bistrot, maintenant cet effroyable coup de théâtre ! Y a-t-il encore un avenir pour La Classe ouvrière, donc l’Histoire ?
A sectaire, sectaire et demi ou tel est pris qui croyait prendre…