On n’y coupera pas ! Quelle que soit la qualité ou la médiocrité de leur dernière parution, Mmes Nothomb et Angot seront de toutes les émissions et chroniques littéraires. En attendant le prochain Houellebecq. C’est inévitable. C’est ainsi.
Il paraît chaque année en France des centaines d’ouvrages. Dans cet océan de publications diverses, il est bien sûr des îlots de pur bonheur de lecture que n’abordent jamais les gros paquebots du Médiatisme.
La seule possibilité désormais offerte pour que s’ouvrent les portes d’une célébrité passagère consiste à faire un « coup ». Vous souhaitez, par exemple, traiter d’un thème en vogue, le multiculturalisme, le communautarisme, la laïcité républicaine menacée par le religieux, le choc des cultures. Intituler banalement le fruit de votre réflexion « Regard porté sur la France et l’Europe d’aujourd’hui » condamnerait immanquablement votre bouquin à rejoindre le bas de la pile vers laquelle le critique appointé jettera de temps à autre un regard fatigué. A moins, bien sûr, de disposer des relations nécessaires ou d’intégrer les réseaux de copains-complices qui font la pluie et le beau temps dans le monde de l’édition et de la critique.
Conscient d’être condamné à l’anonymat, il vous faut réagir. Profitant d’un fait divers particulièrement sordide plus ou moins lié à votre sujet d’étude, vous laissez tomber votre titre ringard et optez alors pour « Eloge littéraire d’Anders Breivik », ce nationaliste norvégien fanatique convaincu de sauver sa patrie en assassinant froidement soixante-dix-sept jeunes gens. Le renvoi, en peu de mots, à un acte d’une stupéfiante barbarie encore présent dans les mémoires, avec cette pointe de sympathie envers son auteur, c’est bon ça, coco ! Voilà que votre livre regagne le haut de la pile ! Voilà que la basse-cour littéraire s’agite et caquette. Voilà que l’époque, toute acquise à la provoc’, au scandale, à la « transgression », vous remarque. Et accessoirement vous vend et vous achète. N’est-ce pas là l’essentiel ?
Auteurs qui souffrez de demeurer en marge, voici quelques titres offerts gracieusement, destinés à vous en sortir et qui feront un malheur en couverture de votre prochain ouvrage : « L’inceste épanouissant », « La pédophilie heureuse », « Hitler, un type sympa mais mal entouré ». Faites-le préfacer, si possible, par un ancien maoïste. Succès garanti !
Succès garanti
7 septembre 2012 par Floréal
Très bien vu… Quelle chance nous avons de n’avoir pas cherché à sortir un livre, même mauvais, cette année, pas plus que l’année dernière et fort probablement encore moins l’an prochain.
Sans oublier de surjouer à la télé le côté « écrivain maudit et incompris » comme l’obscène Richard Millet sur France 3 cette semaine. Lamentable.
Tous. Ils ont tous le sentiment que leur truc est en danger, leur radio, leur canard. Ils courent tous derrière les bankables. Ils sont tous persuadés que leur machin ne tient qu’à ça. La simple vérité c’est qu’ils sont tous tellement vains et conformes qu’ils ne peuvent prendre part à rien de significatif. J’appelle ça le syndrome Jean-Louis Foulquier : être gentil, parfaitement gentil, avec tout le monde, mais toujours saluer les gens par ordre de tirage décroissant. D’ailleurs, nous, qui voulons serrer des louches, nous avons tendance à nous mettre en rang comme ça, bien contents quand vient notre tour. Risibles, tous. Et nous les artistes sommes peut-être les plus coupables et les plus ridicules.