Du 18 au 20 mars 2003, au cours d’une vague de répression connue sous le nom de Printemps noir (« Primavera negra »), la Sécurité d’Etat cubaine, la police politique, arrêtait 75 personnes, dont 29 journalistes, des bibliothécaires, des médecins, des militants des droits de l’homme et des militants pour la démocratie.
Cette opération visait à mettre un terme au développement d’une réelle opposition au régime dictatorial cubain. Le journalisme indépendant commençait en effet à prendre une importance inquiétante pour le pouvoir, là où la seule expression admise depuis quarante ans était celle du Parti communiste. Le poète Raúl Rivero et le journaliste Ricardo González avaient créé la revue indépendante De Cuba, qui connaissait un beau succès, et le lancement à la même époque du projet Varela* avait lui aussi donné quelques sueurs froides à la mafia castriste au pouvoir.
L’arrestation de ces 75 opposants à la dictature se fondait sur la loi n°88, dite « de protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba », et qualifiée à juste titre de « loi-bâillon » par la dissidence. Pour maintenir la tradition, qui veut que tout mécontentement en pays dictatorial soit inspiré et encouragé par l’étranger, les opposants furent évidemment accusés d’être à la solde des Etats-Unis.
Les 75 furent condamnés à des peines allant de 6 (pour un seul d’entre eux) à 28 ans de prison, la moyenne se situant entre 20 et 25 ans d’incarcération. Ils seront libérés à partir de 2010, sur intervention notamment de l’Eglise catholique, les deux derniers en 2012. Les journalistes furent contraints, à leur libération, de quitter Cuba. La plupart d’entre eux se réfugièrent en Espagne.
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* Le projet Varela fut une initiative lancée par un opposant au régime castriste, Oswaldo Payá, fondateur du Mouvement chrétien de libération. Ce projet se fondait sur un article de la Constitution cubaine de 1992 permettant aux citoyens de proposer de nouvelles lois à la condition que la demande ait recueilli 10000 signatures. Les promoteurs du projet Varela, prévoyant notamment le droit à la liberté d’expression et la libération des prisonniers politiques, en recueillirent 11200 en 2002, puis 14000 supplémentaires en 2004. Le régime castriste ne donna évidemment aucune suite à ce projet. Parmi les 75 personnes arrêtées lors du « Printemps noir », 25 en avaient été signataires. Son principal instigateur, Oswaldo Payá, devait quant à lui mourir dans un étrange accident de voiture, le 22 juillet 2012.
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