La mise au jour de la fosse commune du cimetière de Castellón, financée par la Generalitat de Valence, a permis jusqu’à présent d’exhumer treize corps de républicains fusillés par le régime franquiste. Des archéologues et des anthropologues légistes ont localisé ce jeudi le corps de Casimiro Isidro Beltrán, maire de Lucena, membre de la Gauche républicaine, fusillé le 16 mars 1939 et qui fut probablement la première personne assassinée à être enterrée dans la fosse commune du cimetière cette année-là.
Le corps du maire a été retrouvé à environ 1,20 mètre de profondeur. Les douze premiers corps, situés à peine à un demi-mètre de profondeur, ont été retrouvés dans des boîtes de réduction. Tous, à l’exception d’un paysan membre du PSOE, étaient des militants anarchistes de la CNT, fusillés en 1943 et 1944.
Le maire de Lucena, une municipalité de la région de l’Alcalatén, faisait encore l’objet d’un dossier en cours, un an après son exécution, auprès du tribunal chargé de la répression économique, selon la liste établie par l’historien Fernando Peña dans El precio de la derrota. La Ley de Responsabilidades Políticas en Castellón, 1939-1945 (« Le prix de la défaite. La loi des responsabilités politiques à Castellón, 1939-1945 » (2010).
A la différence d’autres fosses communes comme celles de Paterna (province de Valence), qui peuvent avoir plusieurs mètres de profondeur et contenir de nombreux corps, celles du cimetière de Castellón sont de dimensions plus réduites (la liste complète des victimes figure au bas de ce texte). En 1989, selon l’archéologue Jorge García, codirecteur des fouilles, il y a eu des travaux dans le cimetière. « Le fossoyeur de l’époque, qui connaissait l’endroit où se trouvait chaque fusillé, a commandé des boîtes en bois, a mis les noms dessus, a sorti les républicains de là où ils se trouvaient et les a enterrés dans la zone n°1 du cimetière », explique-t-il lors d’une conversation téléphonique avec le site elDiario.es. Les spécialistes ont sorti les boîtes contenant les douze corps et ont commencé le processus d’identification. Au-dessous se trouve une douzaine de corps de militants de l’UGT, de la CNT et de la Gauche républicaine.
Un des corps, celui de Ramón Albella Peris, a été remis à son fils Ramón Albella et à ses petits-enfants et arrière-petits-enfants, qui étaient accompagnés par le directeur général de Calidad Democrática, Iñaki Pérez Rico. Ramón Albella Peris, originaire de l’Alcora, militant de la CNT et soldat de l’armée républicaine, fut arrêté à la fin de la guerre civile, interné dans l’un des trois cents camps de concentration de l’Espagne franquiste, puis transféré dans une prison du Pays basque. Après avoir été jugé et libéré, il est retourné à l’Alcora pour rejoindre sa famille et, trois jours après son arrivée, il fut dénoncé, arrêté de nouveau et emprisonné à Castellón. Albella a été fusillé le 12 février 1943. Le rapport médical signé le jour même de l’exécution indique qu’il est mort d’une « hémorragie produite par un petit projectile ».
Maribel Albella, membre du Groupe d’enquête sur la mémoire historique de Castellón et l’une des petites-filles de la victime, était très reconnaissante de pouvoir clore ce terrible épisode avec la récupération des restes de son grand-père : « Aujourd’hui, ont été exhumés les restes de mon grand-père Ramon. Son fils Ramon, trois de ses petits-enfants et deux de ses arrière-petits-enfants étaient présents. C’était très émouvant et nous sommes reconnaissants pour l’énorme travail des membres de l’Association pour la mémoire historique, ainsi que pour l’attention et les marques de sympathie reçues », a-t-elle déclaré.
L’équipe de fouille, formée par deux anthropologues légistes, deux archéologues et deux historiens, a été financée par la Conselleria de Participacion, Transparencia, Cooperacion y Calidad Democratica dirigée par Rosa Pérez Garijo. « L’ouverture des fosses communes nous permet de localiser et de récupérer les victimes, de les identifier, de les rendre à leurs familles. C’est le plus grand exercice de vérité, de justice et de réparation dont ce pays a besoin », affirme la conseillère Rosa Pérez.
Dans la province de Castellón, la répression franquiste a été encore plus sauvage que dans le reste du territoire. « Les terres de la province de Castellón ont connu une répression franquiste très supérieure à la moyenne de la région du Pays valencien », écrit l’historien Vicent Grau dans le livre collectif La repressió franquista al País Valencià (2009). La mise à jour la plus complète sur la répression dans la province, de l’historien José Luis Porcar, membre du Grup per a la Recerca de la Memòria Històrica de Castelló, dans Un país en gris i negre [« Un pays en gris et noir »] (2020), indique que 1.227 personnes ont été fusillées dans la province (dont 1.157 originaires de Castellón).
Identification des victimes trouvées dans les boîtes de réduction
à 50 cm de profondeur dans la fosse :
1. Luis Picó Salvan (Segorbe), milicien de la CNT, potier, fusillé le 15 juin 1944.
2. Bautista Palatsí Montull (Salzadella), membre de la CNT, ouvrier journalier, fusillé le 15 juin 1944 .
3. Benigno Morata Roca (Sot de Ferrer), comptable, membre de la CNT et de la Gauche républicaine, fusillé le 1er juillet 1943.
4. Salvador Peris Llorens (Onda), milicien de la CNT-FAI, fusillé le 1er juillet 1943.
5. Eduardo Pallarés Barrachina (Sant Joan de Moró), chauffeur, membre de la CNT-FAI, fusilléé le 23 mai 1943.
6. Vicente Julián Asensio Reverter (Vila-real), paysan, milicien, membre de la CNT, fusillé le 6 juin 1943.
7. Vicente Claramonte Martínez (Almassora), membre du comité confédéral de la CNT-FAI, élagueur, fusillé le 6 juin 1943.
8. Clemente Garcia Beltrán (Sant Mateu), membre du comité du PSOE, agriculteur, fusillé le 20 avril 1943.
9. Ramón Aicart Andrés (l’Alcora), briquetier, milicien de la CNT-FAI, fusillé le 18 février 1943.
10. José Tormo Granell (l’Alcora), vendeur ambulant, milicien de la CNT-FAI, fusillé le 13 février 1943.
11. Álvaro Barberá Segarra (Albocàsser), conseiller municipal, membre de la CNT, ouvrier municipal, fusillé le 13 février 1943.
12. Ramón Albella Peris (l’Alcora), manoeuvre, membre de la CNT, fusillé le 12 février 1943.
Identification des huit victimes recherchées
à 1,50 mètre de profondeur dans la fosse :
1. Ricardo Sánchez Vila (Canals), tanneur, membre de la Gauche républicaine et de l’UGT, mort le 16 mars 1939.
2. José Garí Boix (Burriana, alq. Sta Bárbara), Labrador, milicien de l’UGT, mort le 16 mars 1939.
3. Manuel Bueso Puig (Coves de Vinromà), travailleur journalier et huissier de justice, membre de la CNT, mort par asphyxie des suites de tortures le 4 mai 1939.
4. Marcelino Ora Ribera (Castellón), paysan, membre de l’UGT, fusillé le 22 août 1939.
5. Agustín Martí Mateu (Useres), paysan, milicien de la Gauche républicaine et de la CNT, fusillé le 3 novembre 1939.
6. Francisco Bachero Bartol (Argelita), travailleur journalier, conseiller municipal, membre de la CNT, fusillé le 3 novembre 1939.
7. Casimiro Isidro Beltrán (Lucena del Cid), praticien, maire Gauche républicaine, mort le 16 mars 1939.
8. José Llach Ibañez (Villahermosa del Río), commerçant, maire UGT-CNT, fusillé le 3 novembre 1939.
Source : « eldDiario.es ».
Traduction : Floréal Melgar.
Merci pour ces traductions et de faire connaître le passé de ces combattants du franquisme.
Patrick