Réunir près de 15 000 personnes dans la capitale pour une manifestation, quand l’agglomération parisienne compte dix millions d’habitants, c’est ce que l’Union communiste libertaire, clone du NPA, appelle « une riposte populaire d’ampleur ». On pourrait se contenter de s’amuser de ce vocabulaire imbécile et vaniteux qui caractérise un charabia militant n’ayant précisément pas grand-chose de populaire. On le pourrait, en effet, s’il n’y avait pas derrière cette crétinerie gauchiste langagière quelque chose de plus grave qui a consisté, en l’occurrence, à voir les militants d’une organisation se réclamant de l’anarchisme jouer à nouveau les « porteurs de valises » d’une dangereuse imposture, ici l’islam politique, comme le firent avant eux, au seul profit du FLN, d’autres « communistes libertaires » aussi futés, du temps de la guerre d’Algérie. Près de soixante ans plus tard, si le FLN est toujours là après un exercice du pouvoir sans partage et toute la pourriture qui s’y rattache, on aurait bien du mal à trouver trace, là-bas, d’un embryon de communisme libertaire. Et il y a fort à parier que sur ce terrain de l’intrusion conquérante et liberticide de la religion dans l’espace public, nos vaillants pourfendeurs de l’« islamophobie » connaîtront la même efficacité que leurs ridicules devanciers en espérant tirer profit de leur soutien à ce qu’ils croient être une classe ouvrière de substitution.
Il est aisé de comprendre que les diverses officines politiciennes, toujours en quête d’une clientèle, adaptent leur offre de marchandises mentales aux modes militantes du moment. Aller pour cela jusqu’à faire bras dessus, bras dessous, avec des imams délirants, des « insoumis » célébrant l’unité nationale retrouvée sous le drapeau tricolore et sur fond de Marseillaise et d’« Allahu akbar », de profondément réactionnaires Indigènes de la République, voilà qui devrait quand même interroger des militants libertaires si le désir de se faire une place à tout prix dans la galaxie gauchiste ne l’emportait pas sur la fidélité à quelques principes anarchistes élémentaires, d’une part, et sur un sens critique un peu plus aiguisé, d’autre part.
Fort heureusement, tous les libertaires ne se sentent pas tenus, au nom d’un antiracisme dévoyé, d’emboîter le pas aux islamo-gauchistes du NPA et à tous les « idiots utiles » de circonstance ralliés à ce désastre confusionniste en cours. A ce titre, il faut se réjouir de n’avoir pas vu apparaître la signature de la Fédération anarchiste dans l’appel à manifester dimanche dernier, et plus encore de lire le communiqué* que cette organisation a rendu public à cette occasion.
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Lamentables bandes de VRP multicartes qui font aussi fonction de crieurs sur la foire à empoigne sur de vieilles rengaines !
Eh bien… comme quoi, dans le titre de ton papier, un seul mot est réellement désespérant… c’est bien sûr le mot « nouveau ».
Tels pères,…
OK 100% d’accord avec cet article ! Que viennent faire ces « anarchistes » dans cette mascarade puante de religion ?
J’ai bien lu le communiqué FA. Super… Pas de langage militant, du tout, et une belle langue moderne, avec des « celles-et-ceux » à qui mieux mieux, et des points ségrégationnistes ajoutés çà et là pour faciliter la lecture. On sait s’adapter, même à la ringardise. (Soupir.)
Deux « celles-et-ceux » dans le communiqué FA, cela me paraît insuffisant pour justifier cet « à qui mieux mieux ».
En lisant le texte étrange de la FA sur le sujet qui pourrait être cette manifestation de démence du 10/11 – on peut quand même s’étonner qu’il n’en soit nullement question dans le communiqué – à laquelle a participé un groupuscule d’anarchistes d’une stupidité désarmante, je relève que ces gens-là (la FA) pensent que « la tradition est une des ennemies de l’émancipation ». J’aimerais laisser cette considération de Pasolini à la réflexion des lecteurs du blog.
« La révolution n’a pas pour objectif d’abolir le passé, mais de permettre à ce qui, dans le passé, était entravé, opprimé, de s’épanouir et de fructifier. »
Et ce commentaire d’Olivier Rey :
« Voilà pourquoi, pour Pasolini, s’opposer au nihilisme capitaliste comportait nécessairement une dimension conservatrice, voire réactionnaire. »
Pour certains zanars, avec ce genre de propos, on a dépassé la limite du supportable car il n’y a d’horizon que dans le : « du passé faisons table rase ».
Pour toussétoutes il vaut mieux jargonner et lutter contre toutes les traditions, abattre la langue même pour en faire un charabia insipide de mièvrerie obligatoire.
Et encore une citation d’un anarchiste qui a su lutter jusqu’au bout : « Je veux créer de nouvelles formes de vie partagée ; parce que celles qui existent sont trop misérables, trop étroites. […] Mais ce serait folie que de vouloir supprimer les formes du lien, les quelques-unes qui sont restées ! Nous avons besoin de formes, pas d’absence de formes. Nous avons besoin de tradition, pas d’absence de cadre. » Gustave Landauer p. 89, revue L’inventaire n° 9
Bien à vou-ze-s.
Aristide D.
J’ai déjà eu l’occasion d’écrire quelque part, mais je ne me souviens plus où exactement, que « Du passé faisons table rase » était l’un des vers les plus cons que l’on puisse trouver parmi les paroles de toute la production chanson de langue française.
Juste une petite remarque, cependant : le communiqué FA ne dit pas « la tradition » au sujet des ennemis de l’émancipation, mais « les traditions », ce qu’on est en droit de comprendre comme « certaines traditions », qui sont indiscutablement néfastes, en particulier dans le domaine religieux qui fait l’objet du communiqué. Le singulier – qui ne figure pas dans le communiqué – est effectivement de nature à une interprétation de type « toutes les traditions », et je ne pense pas que ce soit ce qu’ont voulu dire les rédacteurs.
Merci Floréal pour ton texte. Olivier