Il va falloir se faire à cette triste idée : le prix Kadhafi des droits de l’homme ne sera plus attribué désormais.
Créée en 1988 par celui qui s’autoproclama modestement « Guide de la révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste », et qui laissera un souvenir ému à tous ceux qui voient dans l’humanisme un dernier refuge contre la barbarie du monde, cette distinction récompensait chaque année des personnages du même acabit, mus par une sensiblerie quasi maladive. Qu’on en juge !
En 1996, Louis Farrakhan, fanatique ethno-religieux américain, reçoit cette récompense méritée. Leader de l’organisation Nation of Islam, financée par la Libye, il se distingue notamment par un antisémitisme virulent, point d’ailleurs commun à nombre de lauréats de ce prix. Deux ans plus tard, c’est un grand ami du régime libyen, partageant grosso modo la conception toute particulière du colonel en matière de droits de l’homme, qui se voit consacré : Fidel Castro, sorte de Bisounours barbu régnant depuis plus de cinquante sur un îlot de libertés multiples, sur fond de musique dansante.
D’abord marqué par la religion protestante, devenu communiste d’appareil pour rejoindre ensuite l’extrême gauche avant de se convertir à l’islam après une brève liaison avec le catholicisme, c’est un homme de conviction, comme on le voit, que son ralliement aux thèses négationnistes et antisémites les plus nauséabondes désignait naturellement comme récipiendaire du prix Kadhafi en 2002, l’ineffable Roger Garaudy. En 2004, la nouvelle idole des crétins gauchistes tiers-mondains, Hugo Chavez, militaire catholique anti-impérialiste, est à son tour primée. Contrairement à d’anciens complices du dictateur libyen, reconnaissons-lui une certaine fidélité en amitié, lui qui, à l’annonce de la mort de Kadhafi, vient de regretter « l’assassinat d’un martyr » (sic).
L’année suivante, cette récompense honorable vint distinguer un personnage hélas trop peu connu, Mahathir bin Mohamad, homme politique malaisien qui s’illustra, à la tribune de l’Organisation de la conférence islamique, par cette déclaration follement originale entre toutes – et par laquelle on reconnaît les belles âmes – consistant à prétendre que les juifs dominent le monde… Autre grand ami du défunt, au point de fermement condamner dès son début la rébellion libyenne de Benghazi, l’ex-leader puis profiteur corrompu de la révolution sandiniste, Daniel Ortega, remporte le trophée en 2009.
Il est certes bien venu d’ironiser sur l’attitude de ces actuels dirigeants occidentaux que la vente d’armes et le coup de pouce de leurs services secrets au dictateur libyen dans sa chasse aux opposants ne gênèrent guère durant de longues années, avant que ce colonel fréquentable se mue tardivement à leurs yeux en dictateur pestiféré. Pareille ironie, cependant, peut être adressée à cette gauche imbécile, jamais rassasiée de ses erreurs et de ses idolâtries passées, qui ne trouva longtemps rien à redire à ce flirt poussé que ses héros plus ou moins dictatoriaux vécurent avec le tyran de Tripoli.
La liberté n’a pas de prix !
21 octobre 2011 par Floréal
Super article, Floréal, en lien sur notre blog Pavillon Noir/ !
Rackham
Ca me fait le même effet quand le prix Nobel de la paix (!!!) est généreusement offert à Henry Kissinger ou à Yitzhak Rabin, entre autres faucons… (des vrais ?).
Chris
C’est étonnant la façon dont certains dictateurs n’ont pas les honneurs de la grande et belle cour de La Haye…
Une balle dans la tête, direct, ou par l’intermédiaire d’un drone ou un hélico du monde libre en lieu et place du légendaire « procès pour crime contre l’humanité ».
La liste s’allonge : Ceusescu et autres Ben Laden, Kadhafi, etc. A qui le tour ?
Le POIDS des balles n’est pas le même, les MESURES non plus !
Chris
Cher Landrain,
Ta comparaison entre le Nobel de la paix et le prix Kadhafi des DdH, pour pertinente qu’elle est, aurait grandement gagné, précisément en pertinence, si tu n’avais omis de rappeler que, conjointement à Kissinger et Rabin, partageaient leurs prix Le Duc Tho et Arafat.
Certes, Le Duc Tho l’a refusé, mais il ne suffit pas de refuser la distinction d’une institution que très justement tu abhorres, encore vaudrait-il mieux ne pas l’avoir méritée.